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Suite de la série d'articles à la découverte des écuyères des cirques d'antan: une nouvelle amazone célèbre : ADÈLE DROUIN , toujours à l'aide du livre Ecuyers et écuyères: histoires des cirques d'Europe (1680-1891) publié en 1893, par le baron de Vaux, Maxime Gaussen , Henri Meilhac et Victor Franconi

Les deux premiers épisodes:

écuyères et amazones des cirques d'antan : Caroline Loyo

Ecuyères et amazones des cirques d'antant 2, Pauline Cuzent

 

 

Pour tous les adeptes de l'équitation sans mors, ou en cordelette, qui s'imaginerait que cette façon de monter est une invention des chuchoteurs éthologues américains.. lisez la suite!

  adele-drouin.JPG

 

C'est vers 1865 ou 1866 que M'" Adèle Drouin a débuté au cirque de l'Hippodrome.

M. Gaussen et M. de Corbie furent ses premiers maîtres. De taille moyenne, avec un joli visage et un buste merveilleusement bien fait, embelli par la nature de tout ce qui peut en rendre les contours plus séduisants, elle fut charmante en selle dès le premier jour et acquit bientôt une tenue exceptionnelle. C'était elle qui montait avec M. de Corbie dans les « Sauteurs de Versailles » les chevaux dressés par M. Gaussen aux airs relevés de l'ancienne école. Ces chevaux étaient tellement durs dans leurs sauts que les hommes n'y pouvaient tenir qu'en selle à piquer. Mlle Adèle n'était, au contraire, jamais déplacée... Elle fut plus tard choisie par M. Gaussen pour monter la célèbre jument d'école Janina.

adele-drouin.jpg

Bientôt M. de Corbie, ayant vu travailler sans bride la jument Diane, qui devait plus tard appartenir à Adèle, essaya de dresser ainsi un assez beau cheval blanc de l'Hippodrome. Il réussit, et ce cheval y a paru pendant toute une saison, monté sans bride par cette écuyère.

Après l'incendie de l'Hippodrome, Adèle Drouin fut engagée au Cirque des Champs-Elysées.

Elle s'y fit applaudir sur sa jument Diane. Cette jument avait appartenu pendant plusieurs années à un officier, qui lui avait fait un dressage complet de haute école, le baron Faverot de Kerbrech, auteur du Dressage méthodique du cheval de selle, d'après les derniers enseignements de Baucher.

 

Elle changeait de pied, à chaque temps de galop et était déjà mise au piaffer, au passage, au pas et au trot espagnol, lorsque l'idée vint à son propriétaire de lui apprendre à exécuter son travail sans bride, d'après les procédés de M. le comte de Lancosme-Brèves, qu'il avait déjà pratiqués sur un autre cheval.

Mais ici la difficulté était bien plus grande, car il s'agissait d'obtenir sans aucun frein, et par conséquent sans pouvoir marquer aucune opposition aux actions des jambes, les alluresartificielles, qui demandent la concentration des forces de l'animal, comme le piaffer et le passage, et celles qui exigent un soutien de la main comme le pas et surtout le trot espagnol. Il résolut cependant le problème, et, quand la jument Diane débuta au Cirque, Adèle Drouin put lui faire exécuter sans bride le travail suivant :

Première partie: Entrée au galop, arrêt, salut, reculer, huit de chiffres au reculer;

2° pirouettes ordinaires à droite et à gauche ;

3° grand trot, huit de chiffres ;

4 au pas, voltes à droites et à gauche en tenant les hanches;

5° petits contrechangements de main successifs au pas en tenant les hanches.

— Deuxième partie :

6 Pas espagnol entremêlé d'arrêt avec tension soutenue de chaque jambe

7° départs au galop entremêlés de changements de pied en l'air et d'arrêts instantanés suivis

immédiatement de demi-tours exécutés au reculer ;

8° piaffer et passage;

9° trot espagnol;

10 galop allongé, arrêt brusque au milieu du manège et sortie au reculer précipité.

 

Elle fait en 1866 la une du "Nouvel illustré", pour cette sortie au reculer sans bride sur un pur sang arabe "d'une blancheur de lait" (agrandir l'image en taille réelle pour lire le commentaire enthousiaste!)

Adele-drouin-monte-en-amazone-sans-bride.jpg

Retour au baron de Vaux : Nous croyons intéressant de faire connaître au lecteur comment on arrive au dressage sans bride. Le point capital est naturellement d'obtenir facilement l'arrêt à toutes les allures. Pour cela, on laisse d'abord la bride à la tête de l'animal. Les rênes étant sur le cou au pas, on touche délicatement la nuque avec le bout de la cravache. En même temps, ou presque aussitôt après, on arrête en prenant pour un instant la bride dans l'autre main. On répète dix fois, vingt fois, jusqu'à ce que le cheval s'arrête au simple contact de la cravache sur sa nuque. A ce moment on caresse. Puis on recommence très souvent, jusqu'à ce que l'animal ait pris l'habitude de s'arrêter court dès qu'il sent la cravache ou même dès qu'il la voit sur le point de le toucher. Quand ce travail se fait très sûrement au pas, on suit la même progression pour le trot et pour le galop. .

On parvient dès lors assez facilement à remplacer, dans le maniement du cheval, les rênes par la cravache. Le reste n'est plus qu'une question de tact.

Quand le cheval s'arrête très docilement à la cravache, on ôte la bride. Puis on peut essayer d'obtenir les arrêts à la voix, c'est-à-dire en prononçant très bas l'interjection « oh I » avant de montrer la cravache à la nuque. Cela s'obtient alors assez vite.

Enfin on arrive assez facilement aussi à arrêter ou à ralentir en portant simplement le haut du corps en arrière, et cela de même en faisant, chaque fois, précéder d'une retraite de corps le signal de l'arrêt (cravache ou voix).

Pour les allures artificielles, la difficulté se décuple, car il faut par des tâtonnements arriver à faire comprendre au cheval que, lorsqu'on lui demande le piaffer par exemple, la menace de la cravache à la nuque ne doit plus signifier « immobilisation », mais bien « barrière à ne pas dépasser » malgré l'action communiquée par les jambes.

C'est pour cette raison que le dressage de la jument Diane représentait un véritable tour de force, et nous croyons savoir qu'il n'a jamais été renouvelé depuis.

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Maxime Gaussen, un écuyer et écrivain de talent, vers 1865, l’avait eu comme élève. Sa tenue à cheval était exceptionnelle : « … la jeune personne montait… les fameux « sauteurs de Versailles » mis par Gaussen aux anciens airs et sur lesquels elle n’était jamais déplacée, malgré la dureté de leurs sauts qui obligeait la plupart des hommes à les monter en selle à piquer. En récompense Gaussen confiait à la jolie Adèle sa célèbre jument Janina. » (André Monteilhet, Les maîtres de l’œuvre équestre, Odège, Paris, 1979).

ecuyere-amazone-cirque.JPG

 

 

Mlle Adèle Drouin a monté plus tard, au Cirque, plusieurs autres chevaux d'école remarquablement dressés par MM. Franconi. Mais un beau jour l'amour l'a emporté sur l'art, et elle a quitté la carrière équestre pour se marier.

Il s'agit vraisemblablement bien d'Adèle et non d'Emilie dans cette photo dont la légende semble erronée 

 

 

 

 

Tag(s) : #Equitation en amazone spectacle écuyère de cirque
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